Un jeune homme vient noyer son chagrin dans le vin...

Dimitryon était assis à une table avoisinante. Voyant le nouvel entrant, il ne peut s'empêcher d'être intrigué par son allure. Il se lève et se dirige vers lui :

- Salut à toi, citoyen, tu sembles être dans un bien mauvais état. Puis-je te payer cette chope de vin ?

Agathoclès lève la tête vers son interlocuteur, sourit et lui fait signe de s'asseoir à sa table.

- Je suis une bien piètre compagnie pour un homme de bien, en ce soir... La raison en est un triste deuil qui accable ma famille, et le désir qui me ronge d'apaiser ma colère.

Une pause.

- J'accepte et ta compagnie et ta chope, l'ami ! En espérant qu'elles me feront oublier quelque peu mon désespoir. Qui es-tu donc, toi qui m'offre le réconfort?

- Tu as sans doute entendu parler de moi, je suis Dimitryon, descendant d'une des plus fières familles d'Athènes. Nous sommes citoyens de père en fils dans ma famille depuis des générations et accomplissons notre devoir avec honneur et constance. Je suis moi-même chef de famille et mes fils auront bientôt fini leur éducation. Je les destine à un grand avenir. Et toi-même ? Je ne voudrais pas te faire ressasser des mauvais souvenirs, tu sembles en avoir déjà assez, aussi, sens toi libre de me parler de ce que tu souhaites.

- Je suis Agathoclès, fils de Dikéon, disparu il y a peu. Ma famille ne peut se parer d'ancêtres aussi illustres que les tiens, Dimitryon, mais nous servons Athènes du mieux que nous pouvons. Pour ma part, j'ai remporté une couronne aux Jeux d'Olympie il y a trois ans.

Le malheur qui me frappe aujourd'hui est terrible, car non seulement je pleure un père défunt, mais de plus celui-ci a été sauvagement assassiné dans l'ecclesia lors de l'émeute dont tu as sûrement entendu parler !

A ces mots, Agathoclès ne peut s'empêcher de serrer les poings. La rage du jeune homme est presque palpable.

L'aubergiste t'apporte ta commande.

Excuse moi citoyen mais j'ai entendu ce que tu viens de dire. Sache que je compatis à ta douleur.
Tel que tu me vois je suis orphelin de père et de mère, tous les deux morts durant la tentative de prise de pouvoir par Cylon en 610. Je n'avais que 4 ans.

Agathoclès opine de la tête.

- C'est bien triste. Mais en ce qui me concerne, je compte bien découvrir qui tenait le poignard qui a ôté la vie à mon père ! Toi tu étais un enfant et tu n'as donc pas pu venger leur mort : il en va autrement de moi.

Le jeune homme donne un brusque coup de poing sur la table pour ponctuer ses paroles. Une lueur de meurtre miroite dans ses yeux bleus.

Aglaophon, se trouvant non loin de là, ne put s'empêcher d'intervenir.

Jeune Agathoclès, je comprends ton émoi ainsi ton courroux. Mais contre qui veux-tu te venger ? L'Ecclésia est tombé dans la folie et nul ne saura sans doute jamais qui a fait succomber untel ou un autre... Cela est d'autant plus vrai que certains ont semble-t-il déjà tourner la page.

Si tu veux venger ton père, ne t'égare pas dans la violence mais aventure-toi dans la recherche de la vérité... Si tel est le cas, alors, je serai à ta disposition pour te venir en aide.

Aglaophon lança un signe à l'aubergiste lui montrant qu'il paierai le verre commandé par le jeune homme. Puis il tendit la main à Agathoclès.

Je me présent. je me nomme Aglaophon, fils de Polygnote. Moi aussi, mon père est mort et depuis j'ai repris la forge familiale.

- Je te remercie pour ton soutien... et pour le vin. Pour ma part, c'est Philodémos, mon frère aîné, qui devient chef de famille et reprend le domaine familial. Tu as bien raison, Aglaophon, la colère d'Arès ne doit pas m'aveugler et c'est la quête de la vérité qui doit animer mon esprit.

Le regard d'Agathoclès se fait perçant.

Etais-tu toi-même présent durant l'émeute ? As-tu par hasard aperçu un homme de 55 ans, corpulent, une cicatrice près de l'oeil, dégarni, doté d'une barbe blanche et fournie ? Je recherche toute information pouvant me permettre de comprendre comment il s'est retrouvé avec un poignard dans le ventre.

- A quoi bon, soupire Agathoclès dans un brusque accès de découragement, ce n'est pas ainsi que j'apprendrai quelque information. De toute évidence, aucun de vous deux ne se trouvait à l'ecclesia ce jour-là !

Sur ces mots, le jeune homme vide sa timbale d'un trait et s'apprête à se lever.

J'étais présent à l'Ecclésia mais je t'avoue de ne pas avoir prêter attention à cette émeute meurtrière dans la mesure où j'étais moi-même pris à partie. Je ne peux donc pas, à mon grand regret t'éclairer sur le sujet.

Aglaophon voit le jeune homme s'éloigner sans mot dire.

Puis il regarde Dimitryon :

Aurais-tu peur de moi, Dimtryon ?

Puis il s'éloigne en souriant...

- Je n'ai pas peur de toi, Aglaophon, je n'ai juste pas envie que l'on me voit parler avec toi. Tu n'es pas le genre de compagnie qui m'enchante le plus.

Agathoclès hoche la tête après les paroles d'Aglaophon, l'air pensif et totalement impassible, puis il salue les deux hommes sans rien ajouter.

Il rejoint l'homme qui lui fait signe d'approcher, de l'autre côté de la salle...

Regardant avec mépris Dimitryon :

Il est vrai que tu préfères la conversation des simplets...

Eclatant de rire

- Moi, préférer la compagnie des simplets ? Si c'était le cas, je t'aurais demandé de rester, je crois, non ?

Tout en parlant, il vide son deuxième verre de vin.

Non tu te tiens très bien compagnie...

-Mmh...Je crois qu'il est temps pour toi de t'en aller, plutôt que de perdre ton temps à faire des jeux de mots stupides et redondants. Tes amis Paraliens doivent t'attendre, il paraît qu'ils ont besoin d'un chef.

L'aubergiste s'approche ...



Messieurs bonsoir ...
Désolé d'interrompre votre petit numéro de cerfs en chaleur, mais, non seulement il n'y a pas de demoiselle à impressionner ici, et en plus, le premier qui dit un mot plus haut que l'autre, ou qui fait un geste plus provocateur que l'autre, je l'étouffe avec ma barbe ...

- Très bien, l'aubergiste, si tu le prends sur ce ton, tu ne me reverras pas de sitôt dans ton auberge, qu'on se le dise. Je ne savais pas que les auberges n'étaient faites que pour les amateurs de conversions philosophiques distinguées. Si on n'a même plus le droit de monter un peu le ton dans un lieu qui se veut convivial, alors je ne sais pas ce que je fais là.

Se lève et se dirige vers la sortie

L'aubergiste continue ...

Si, en plus, tu es susceptible, l'ami, tu n'as rien pour toi ...